Il fut un temps où l'Homme était libre de ses gestes, de ses mouvements, de ses choix et de ses opinions, des plus sensés comme des plus suicidaires il était émancipé de l'aval d'un tuteur ou d'une autorité supérieure et ainsi, il pouvait décider de tout et sur tout, ou presque.
Mais ce temps, comme celui de beaucoup d'autres, depuis bientôt une décennie était révolu, et par la grâce de trois rois aux convictions somme toutes relatives, l'Homme ne fut plus chargé de pareille responsabilité car, pour lui, le Démon déterminait tout.
Cette corvée, Azael s'en incombait plus que quiconque, car de la fratrie, il semblait être le seul qui se préoccupa toujours que leur royaume, péniblement conquis, fut mené d'une main de fer et dirigé, plus que pour satisfaire les plaisirs éphémères et l'ego surdimensionné des Infernaux, de manière sereine et durable, de sorte ainsi à ce que leur ravissement dure tout aussi longtemps. Il n'aurait supporté gâcher tous leurs efforts sous le coup de l'impulsivité ou de la lassitude, il se fallait travailler et gérer en tous temps et une journée durant encore, c'est ce qu'il fit.

Lorsque l'immortel eu terminé de parapher le dernier décret discuté la veille avec son cadet et son aîné et qu'il l'eu déposé sur la pile de tous les autres documents étudiés depuis l'aube, il s'étira longuement, soulagé d'en avoir enfin vu la fin, sans pour autant parvenir à décrisper l'ensemble de ses muscles que des heures passées le cul sur une chaise avaient raidit.
Un coup d'oeil glissé furtivement à la fenêtre de la pièce lui indiqua que le soleil, cet astre lumineux qu'en dépit de tous leurs efforts, ils ne pourraient jamais dominer, aurait bientôt fini sa course dans l'immensité du ciel. Le bleu glacial qui, depuis trois jours, n'était parcouru que par de maigres cumulus s'était paré de safre, d'indigo, d'ocre et de garance, ces teintes riches, chaudes et froides qui, parfois le soir, transformaient l'horizon en une oeuvre à la fois sublime et unique.
Un instant, Azael se permit d'observer cette immense peinture, lui-même artiste fasciné par la beauté que recelait ce territoire. Si le régent avait été l'un des premiers à imposer la patte destructrice, souillée du rouge et du noir du sang de ses victimes, des Démons sur le monde des mortels, il était également le premier à se délecter de ses merveilles. Et ce soir, après telle journée à travailler, il fut prit par le souhait soudain mais pas moins habituel de soulager ses yeux fatigués sur la beauté d'une nature domptée.

L'homme repoussa la chaise, lourde pièce de bois forgé qui tenait plus du trône que du tabouret, puis il se redressa. Sans prendre la peine de ranger, car après tout le monarque était tout aussi réputé pour sa soif d'émerveillement que sa tendance à s'éparpiller, il quitta la pièce et se dirigea tout naturellement vers l'une des immenses tour du château, au sommet de laquelle prenait place l'immense volière qu'il prenait le soin de garnir de toutes les espèces qu'il eu connu, des plus communes aux plus exotiques.
Contrairement aux hommes qu'il avait à sa charge mais dont il n'avait cure, ses oiseaux étaient bien traités, nourris et aimés. Là était d'ailleurs le seul endroit où son amour se dirigeait sincèrement, mais de ceci, personne ne le savait. Cet éden était propriété privée des monarques, et en vérité, la sienne uniquement. Si l'on oubliait le garçon qui prenait le temps de nettoyer l'endroit, l'érudit ne supportait aucune présence en ces lieux et de ce fait, interdisait même l'accès à l’entièreté de la tour.

Aussi, lorsque il tendit la main pour abaisser le loquet de la porte et qu'il fut surpris de le découvrir déjà bien bas, signe évident d'une présence indésirable, le roi fronça les sourcils.
Il poussa le battant, déjà saisi d'un hérissement de mauvaise augure.
Découvrir que le fautif n'était autre que la démone qu'il avait épousé voilà quelques jours n'y changea rien, et très vite, il grogna son mécontentement.

- Je peux savoir ce que tu fou là ?

Le désintérêt flagrant que porta son épouse sur sa personne ainsi que sur ses propos ajouta à l'irritabilité du régent, rendu déjà acrimonieux du fait de sa simple présence en ces lieux privés. A vrai dire, qu'importait la réaction de la belle démone, culpabilité feinte ou fervente opposition, il n'aurait supporté ni l'un ni l'autre après cet affront. Mais au moins une réaction quelconque, un intérêt certain et ce sous n'importe laquelle de ses formes aurait été, à terme, plus admissible que ce détachement agacé que Syan affichait presque avec cette fierté hautaine que chaque noble se complaisait parfois à exhiber. Et Dieu que lui-même ça l’agaçait de voir en cette femme avec qui il devrait certainement passer au moins les prochaines années les traces et mimique d'un sentiment quelconque de supériorité.
Reine ou non, cette gamine n'avait ni droit ni influence en ce bas monde, rien qui ne justifia qu'elle ose se montrer si hautaine, ni même qu'elle y songe.

Depuis une semaine déjà, Azael l'observait, sublime déesse au milieu de primitifs démons, agir à sa guise et ce au mépris des règles, des lois et des désirs de la famille Easus.
Il allait falloir que cela cesse, car bien qu'aucun de ses frères n'ai pour le moment fait la moindre remarque - et à vrai il en aurait pas eu grand chose à carrer si cela arrivait- lui même ne supportait pas la voir ainsi se pavaner, dissimulée derrière le masque à l'en croire inatteignable de maîtresse des lieux alors qu'elle ne fut jusqu'alors qu'une ignoble usurpatrice.

Le cadet des monarques ne proféra aucune menace. Alors que certains prédateurs se permettaient de grogner pour prévenir d'une attaque imminente, lui se contenta d'un mutisme de bien mauvaise augure et s'approcha, plus silencieux qu'une ombre, plus rapide aussi.
L'instant suivant le "Hum" méprisant de la diablesse aux charmes affriolants, Azael se présentait à côté d'elle. Sa patte épaisse glissa sur sa joue fragile sans douceur, attrapa son menton fermement et la contraignit enfin à se tourner vers lui.

Il la dominait, à vrai dire cette frêle enfant semblait davantage tenir de l'elfe fragile que du démon solide, ce n'était pas étonnant. Un instant, il crû même qu'à serrer trop fort, il parviendrait d'une pression à lui briser la mâchoire, mais finalement peu préoccupé par cette éventualité, il se contenta d’émettre un nouvel ordre aussi ferme qu'indiscutable, cassant et implacable.

- Dégage.

Une nouvelle fois, Syan n'afficha ni peur ni soumission, n’émit ni plainte ni supplique. Droite et fière, elle s'obstina en cette arrogance acharnée et suicidaire qui la démarquait du plus ennuyant mais également du plus sensé quidam.
Esclave ou démon, ici tous ployaient l'échine, et qu'il fut servile créature ou serviable personnage, pas un n'eu jamais le culot d'affronter le régent en face, de lui tenir tête sans faillir ou jamais sans craindre d'en tirer heurt ou sanction. Ici, tous se succédaient en courbettes et politesses, jouant des coudes pour déterminer à qui mieux mieux qui serait le privilégié qui aurait l'honneur de satisfaire les désirs et perversités d'une fratrie capricieuse, et  les plus malheureux essuyaient ensuite reproche ou colères sans oser jamais justifier ou défendre la raison de leurs échecs, leurs motivations ou leurs désirs propres. Un constat aussi lassant que les faits en eux-mêmes, et le cadet comme chacun de ses deux autres frères commençait à s'ennuyer du moindre défi alléchant.
La diablesse aux atours affriandants tombait à pic, et jusqu'alors, Azael s'en était plutôt amusé. A la fois curieux et joueur, il observait en silence, lointain spectateur, parfois même acteur secondaire d'une pièce qu'il influençait à sa guise pour le plaisir de la voir se confronter à sans cesse de nouvelles règles ou de nouveaux préceptes qui allaient à l'encontre de ses stupides valeurs. S'en était d'autant plus distrayant que sa belle épouse n'abandonna jamais et chaque fois, elle se rebiffa, se rebella ou s'arrangea pour détourner les interdits imposés.
Aujourd'hui cependant, il n'avait que faire de cette étude qui le satisfaisait tant d'ordinaire, de ce jeu auquel il se prêtait avec l'impatience d'un enfant présenté à un nouveau jouet. Le suzerain avait besoin de solitude, de tranquillité et de la paix seule qu'un jardin secret pu jamais procurer. Il n'avait ni le premier ni le second, et son éden se voyait souillé de la présence indésirable d'une profiteuse ingrate. Il fallait nettoyer.

Plutôt que de concéder à sa requête, le démon assura sa prise sur son avant bras et d'un geste soudain, il vint même se saisir de son poignet droit. Tandis qu'il amenait le bras gauche au dessus de son cou, il se pencha en avant et, d'un mouvement aussi brusque que rapide, ce fut tout le corps de sa belle épouse qu'il fit basculer sur son épaule alors qu'il la soulevait, ce sans jamais lui avoir laissé le temps de réagir.
La jeune femme ne fut à l'instant pas mieux traitée - positionnée - qu'un misérable sac de pomme de terre - quoi que le dit sac n'eu jamais ce genre de privilège de la part d'un roi - et, une main placée sur sa cuisse pour affermir sa prise, ce fut comme un sac que Azael la mena jusque la porte laissée ouverte de la volière.
Si Syan ne se décidait à sortir, lui même l'y forcerait, et s'il devait aller jusque leurs - car ils se devaient de les partager - quartiers pour l'y enfermer et ainsi, avoir la paix, le cadet Easus n'hésiterait pas.

Si la démone fit tout son possible pour échapper à la poigne ferme de son époux, eh bien c'était trop peu car il n'en aboutit rien sinon un acharnement rendu puéril aux yeux des autres créatures qui évoluaient à l'instant dans l'immense château infernal. Azael était trop ferme, son agacement le rendait aussi implacable qu'impassible, elle aurait pu crier, hurler ou supplier, il ne se serait pas davantage décidé à la reposer à terre. Et qu'importait son fragile pull de cachemire qu'elle tirait et déformait, son dos qui encaissait coup et griffures, ou mêmes les regards amusés qui se retournaient à leur passage. Le régent avança sans ralentir et ce jusqu'à se débarrasser du poids encombrant qu'il soutenait d'une épaule sur le large lit conjugal bordé de carmin sanglant.

S'il s'était attendu à ce que la diablesse parée d'obsidienne translucide se débatte et se rebiffe pour filer retrouver le paradis dont elle avait été irrespectueusement tirée, le cadet Easus ne songea pas qu'elle puisse chercher à le devancer après avoir pris le temps de lui mettre des bâtons dans les roues.
Soudainement happé en arrière, il s'effondra sur le matelas, son âme tout autant surprise par le brusque constat d'une faiblesse évidente que titillée par une position qui, pour une fois, n'avait rien de déplaisant. Mais qu'importait ses vaines tentatives, elle s'obstinait et se fatiguait pour rien, et alors qu'elle se redressa pour éloigner leurs chairs, lui même la rattrapa alors qu'elle posait son pied nu sur la moquette ébène qui tapissait le pourtour de leur couche.
Ses deux mains se refermèrent sur la taille de sa Reine pour, une seconde fois, brider ses initiatives et, d'une simple pression, il la tira à nouveau sur les draps que leur lutte commençait à froisser. D'un geste, il échangea les rôles, la belle allongée sur le dos et lui même au dessus, mieux installé qu'elle car si la rebelle n'était qu'assise à côté de lui cinq secondes plus tôt, lui n'hésita pas à se hisser sur elle pour s'assurer qu'elle reste bien immobile.
L'une de ses mains ne tarda pas à trouver le diaphane du poignet droit de la jeune femme, qu'il coinça entre sa paume et la couverture, l'autre lui servit de soutien. Ses jambes endiguèrent quant à elle les assauts de celles de sa compagne, déjà dominée par un poids comme d'une force bien supérieures aux siennes.
Si jusqu'alors, Azael ne souhaitait que se débarrasser de l'intruse inopportune, il convint d'admettre que ce vœu commençait à se débattre avec un autre. Amusé par ce petit jeu, le démon se permit même un sourire provoquant, encore à mi chemin entre la menace sincère, héritée de son impatience à recouvrer la tranquillité de la volière, et la véritable tentation.

- Tu es sûre de vouloir jouer à ça, Syan ?

La question aurait pu être rhétorique, en vérité il lui laissait le choix, elle pouvait se montrer docile et cesser de se débattre, mais c'aurait été moins drôle. Leur dispute promettait d'égayer un peu sa journée, et bien qu'il douta qu'elle puisse y prendre autant de plaisir que lui, le suzerain ne comptait pas bouder cette opportunité sous prétexte qu'elle n'était pas partagé avec la jeune mariée.

Si cette position lui déplaisait ? Non, en rien. A vrai dire, vu d'ici et alors qu'il demeura allongé sur le dos, il y avait plutôt de quoi faire bander un homme. Azael n'était pas de ceux-ci, il lui en faudrait davantage pour attiser le feu de son excitation au point tel que celle-ci se trahisse d'une dureté nouvelle, mais il reconnaissait sans mal qu'être ainsi dominé par une démone au charme ineffable était des plus alliciant. La vision que Syan lui offrait, drapée d'une soie anthracite si légère qu'elle en était transparente, était alléchante. Ses courbes affriolantes, à peine dissimulées de sa vue par de fragiles atours, semblaient n'attendre que ses caresses, ses lèvres pulpeuses, un baiser qu'il ne s'autorisait que rarement.
Azael songea à retenir le brûlant désir de glisser sa main sur la cuisse diaphane de sa reine qu'une minute de combat avait fini par dénuder, mais il n'y céda pas, car il s'agit là d'un parfait moyen pour la tenir en place quelques secondes supplémentaires. Ainsi, lorsque la diablesse prit appui sur sa jambe droite pour faire basculer la seconde de sorte à se départir d'une position si facilement acquise, le roi fit courir ses phalanges sur son épiderme, remontant du genou à sa hanche où il se stoppa pour l'y attraper. Il aurait pu poser sa patte immédiatement sur sa taille, mais l'idée de céder à une caresse qui se voulu aussi aguicheuse que celle subie plus tôt était séduisante.
Le bassin de la jeune femme contraint à demeurer immobile, il fut plus compliqué de poursuivre son geste, Azael en profita alors pour lui même tirer sur ses abdominaux, se redressant ainsi en position demi assise, blottissant son visage tout contre son cou. Il huma un instant son parfum capiteux puis, inspiré, il vint le parcourir de sa langue, amusé par la simple idée de revoir ces rougeurs qui, momentanément, avaient saisi les traits de sa belle quelques longues secondes plus tôt.

Sa colère, sans avoir disparue, laissait lentement place à cette joie perverse qui le motivait à jouer, tantôt pour satisfaire son propre désir, tantôt pour soulager sa propre soif de vengeance. S'il ne souhaitait pas prendre sa femme de force, Azael s'amuserait tout autant à la contraindre de faire face à ses appétences inavouées.

Si la situation n'était pas à son goût, la belle démone aux mèches plus noires que l'ébène ne pouvait s'en prendre qu'à elle, car c'était elle, à attirer son roi à ses côtés sur les draps carmin, qui avait initié ce jeu dangereux et par la suite, poursuivit alors même que son mari lui avait laissé la possibilité de tout stopper. Azael n'avait ensuite fait que profiter de cette concession, délaissant son ire et ses oiseaux aux profits d'une créature au charme pas moins exotique que les volatiles qui papillonnaient dans l'immense cage de la tour Est, et évidemment, il ne le regrettait pas. Si la trop jeune suzeraine quant à elle fut répugnée par le manège qui découla de son choix, tout d'abord il était trop tard, et enfin, elle le montrait plutôt mal.

Tout contre sa gorge, le cadet Easus sentit sans mal le palpitant de la jeune femme s'emballer. Il perçu son souffle doux, brûlant, caresser ses mèches alors qu'elle ne pu le réprimer, tout autant qu'il eu sentit un frisson la saisir peu de temps avant, de dégoût peut-être, mais il pouvait tout aussi bien l'interpréter comme une preuve de son excitation grandissante.  
Tout déjà trahissait que la tournure que prenait leur dispute n'allait pas en opposition avec les désirs inavoués de son épouse, et qu'importait son conflit intérieur, ses efforts pour se persuader du contraire ou pour lui montrer son désaccord, il n'était pas dupe. Aussi, et bien parce qu'il eu prit conscience de cette mascarade, Azael prit un malin plaisir à poursuivre. Et s'il ne put continuer de taquiner son épiderme sensible de sa langue, ses doigts s'en chargeraient pour lui.

Qu'elle s'éloigna un peu ne l'aida en rien, et au contraire, aggrava une situation qui lui échappait déjà.
Peu enclin à tirer plus que nécessaire sur ses abdominaux pour espérer l'atteindre, Azael céda à la facilité. Sa main droite vint se réfugier dans le creux des reins de sa belle et d'un geste, il la fit basculer sur le côté pour prendre place au dessus d'elle. Ils étaient désormais si proches du bord du lit que les mèches obsidienne de la diablesse glissèrent le long du matelas.
Le démon profita qu'elle fut au préalable assise sur lui, une jambe de chaque côté de son abdomen pour désormais, prendre position entre ses cuisses, sans aller au delà ceci dit. Si Syan sembla déjà bien réceptive à la moindre de ses caresses, cette simple proximité serait suffisante pour faire monter sa température d'un cran. Et si jamais ce ne fut pas le cas, alors le seigneur n'aurait qu'un coup de bassin à donner pour accélérer les choses.

Ses phalanges avaient quitté la douceur de sa cuisse. Désormais, elles parcouraient le ventre de sa reine d'une langueur insoutenable, par dessus la soie aguichante, allant parfois pousser le vice jusqu'à frôler ses côtes, juste sous le galbe de ses seins qui tendaient de fragiles atours. Si Azael rêvait de l'en débarrasser, il prenait pour le moment davantage de plaisir à la confronter à ses pulsions, sommes toutes normales, qu'elle fut une femme ou une démone. Le péché de chair était commun à tous les individus de toutes les espèces, inutile de se le reprocher. C'était de désirer un bourreau qui lui, relevait de l'atrocité, mais à vrai dire, le dit bourreau s'en satisfaisait plutôt.

Si Azael eu été étonné de l'initiative de son épouse, celle là même qui la fit presser ses cuisses contre son bassin, il le fut bien davantage de sa chute soudaine et du choc étourdissant qui en suivit.
Tomber violemment sur le dos lui fit brusquement expulser tout l'air qui emplissait alors ses poumons, et tandis que son pariétal percutait la rigidité du sol, ce fut sa vision qui se troubla, pigmentée de milliers d'étincelles d'obsidienne. Un grognement s'échappa d'entre ses lèvres, à mi chemin entre la surprise, la douleur et l'irritabilité et pendant une ou deux secondes, il oublia tout ce qu'il avait bien pu se passer plus tôt, sonné. Leur jeu dangereux au milieu des draps et des coussins, son excitation ascendante ou bien même la présence de sa sublime épouse, il négligea tout jusqu'à ce que finalement, le poids plume qui reposait sur son buste ne se redresse et ne s'échappe.
L'absence soudaine de cette silhouette voluptueuse tout contre sa chair fut plus efficace qu'un bain glacé pour lui remettre les idées en place et très vite, le suzerain reprit contenance, conscience d'abord de la fourberie de son épouse qui, si elle n'avait prémédité leur dégringolade, en profita malgré tout pour le fuir, puis de cette avance qu'elle reprenait sur lui.

Volontairement ou non, la diablesse avait relancé le jeu, et bien qu'elle ai pu marquer un point, elle risquait de bientôt regretter qu'il ne soient pas restés à égalité.

Azael se remit bien vite debout, et tout aussi vite, il la rejoignit.
Plutôt que de stopper directement les gestes de sa reine qui, cette fois-ci, se présentait dos à lui, le cadet de fratrie s'opposa aux conséquences de ses initiatives. Sa lourde patte se posa à plat sur le battant de la porte qu'elle n'avait qu’entrebâillé, à quelques centimètres à peines de sa tête, exerçant par la même suffisamment de pression pour la refermer dans un bruit sec.
Peut-être surprise de voir ses gestes si vite bridés, la démone fit un pas en arrière, réduisant suffisamment la distance entre leurs deux corps pour que le voile fin de sa robe vienne chatouiller les pieds nus du régent irrité. Au même instant, lui même s'avança, contraignant la belle à faire de même pour, bientôt se voir presque plaquée au bois sombre du battant, lui même de nouveau pressé contre elle. Sa main droite toujours à plat sur la stèle, Azael apposa l'autre sur le même objet, bien que plus bas cette fois car à hauteur des côtes de sa proie, celle-ci coincée entre ses pattes.

Ce n'était plus cette passion ineffable qui le motivait, mais une tension nouvelle dont elle était responsable, qu'elle aurait pu interpréter comme une colère froide, le retour de son ire passée. Ses gestes en effet se firent plus lents, à ses yeux peut-être - et il en jouait - plus inquiétants car lourds d'une menace qu'il était prêt à mettre à exécution.
Une seconde fois, le roi enfouit le nez dans le cou de la démone. Il y expira un instant, son souffle lent et profond caressant son artère soudainement menacée, puis il inspira pour humer son odeur captivante. pourtant cette fois-ci, plutôt que de s'attarder sur l'épiderme tendre et fragile de sa gorge, il remonta sur son oreille qu'il devinait tout aussi sensible.
Un instant, il reprit son jeu, recouvrant sa langueur première alors qu'il titillait de sa langue le cartilage sensible, à croire qu'il avait déjà fait un trait sur l'affront subit.
Et pourtant.

- C'est à croire que ça ne t'as pas suffit ..

Il avait murmuré, mais alors qu'il eu fait référence à ce désir avec lequel il avait prit le temps de jouer et qu'il utilisait de nouveau jusque là, ce fut avec la douleur qu'il illustra ses propos.
Ses dents se refermèrent sur le lobe de la belle, englobant le bijou qu'elle avait à l'oreille, dans une morsure qui, bien que au début ai pu être aguichante, devint très vite des plus désagréables.
Azael prit soin de ne pas percer la peau, s'il souhaitait la marquer cela se ferait dans d'autres conditions, néanmoins la pression exercée fut suffisante pour, au moins, tirer un tressaillement douloureux à la fautive.

Si Azael avait choisi à l'instant d'enfoncer ses canines dans la chair tendre de son épouse, ce ne fut que pour la punir d'un affront douloureux dont elle avait d'abord été responsable, puis dont elle avait profité à ses dépends, et uniquement pour cela.
Rien d'autre n'avait motivé son geste.
Ni ire, ni rage ou colère, ni acharnement sadique ou perversion malsaine ( quoi que sur ce point ... en moindre mesure dirons nous. ). Uniquement une forme barbare de justice autoproclamée, d'aucuns diraient une forme d'éducation quelques peu extrême. La jeune femme avait commit une erreur qui relevait de la bêtise, la morsure avait été une punition, mais aux vues des circonstances, celle-ci était plutôt douce pour telle atteinte à un roi.
Ils auraient donc dû en rester là.

Mais Syan s'obstina, de nouveau se rebella contre une autorité pourtant incontestable et une énième fois, elle relança la mise, toujours plus haut au dessus de celle de son adversaire. Le malheureux coup de croc fit face à un puissant coup de coude qui, bien qu'il ne le fit ni chanceler ni faillir, tira au régent un grognement rauque, plus qu'une plainte, une menace sourde. Et pour ponctuer son avertissement, il frappa du poing sur la porte trop fragile, manquant d'y inscrire la marque de ses jointures.
Il se contenta pourtant de cette démonstration, et immobile, il profita du sursaut qui avait tendu tous les muscles de sa compagne pour, lui même, chercher à détendre les siens.
S'il avait froncé les sourcils le temps d'encaisser le nouveau choc, le démon s'efforça de leur faire recouvrer une allure normale, tout comme il s'appliqua à desserrer sa mâchoire soudainement contractée. Enfin, il expira l'air qu'il maintenait contenu dans ses poumons contre la nuque de sa femme, un soufflement qui, un instant, paru lassé, avant d'être suivit par un autre, une expiration plus amusée.
Dans son dos, et alors qu'elle ne pouvait que deviner plutôt que voir, le monarque esquissa un sourire en coin. Si durant une courte seconde, il avait semblé fatigué de cette mascarade, lassé de devoir mater sa propre épouse sans pouvoir céder à ses méthodes habituelles, cette image disparu bientôt, au profit d'un masque plus mauvais, décision prise de relever le défi qu'elle représentait.

- C'est là tout ce dont tu es capable ?

A vrai dire, à y repenser, l'une de ses tentatives avait un instant fonctionné, alors pourquoi ne pas tenter de nouveau ?
Oubliant le dernier coup essuyé et par la même, choisissant volontairement de refuser toute vengeance directe, le cadet Easus reprit leur jeu initial, sans même lui laisser le temps de répondre. Toujours pressé tout contre elle, il abaissa sa patte sur la cuisse de la belle démone, profitant d'une fente aguichante dans sa robe courant de sa fine cheville jusque sa hanche pour cette fois-ci, parcourir sa chair sans la moindre barrière.
Contre toute attente, il fut lent, il fut doux, mais ses caresses, loin d'être innocentes, lui étaient procurées pour déclencher le feu avide et brûlant du désir charnel. Tremblante d'excitation, il l'imaginait mal en venir aussi aisément aux mains, c'était donc là tout le résultat qu'il souhaitait obtenir. Une punition finalement tout aussi jouissive qu'un coup porté pour une justice quelconque. Aussi, et d'une langueur extrême, il remonta sur son épiderme, cédant bien vite à la chaleur de l'intérieur de son muscle pour toujours, amplifier ses sensations.

La première gifle que voulu lui administrer son épouse l'avait amusé. Du moins sa vaine tentative, stoppée net par un réflexe pas même surnaturel, fut responsable d'un sourire traître de son divertissement. Encore une fois, bien peu d'hère dans cette ville désolée osaient tenir tête aux trois régents, et bien qu'il ne leur aurait suffit que de traverser Yldrhen pour rencontrer, à la frontière de deux terres ravagées, bataillons entiers de rebelles insoumis, c'était ici même dans ce château que le monarque capricieux souhaitait occuper son temps à dominer et assujettir d'indisciplinées créatures. L'occasion se présentait enfin, et à l'instant comme à chacun des précédents, il le savoura sans jamais s'en dissimuler, plus heureux qu'un gosse.
La seconde de ce fait, bien qu'elle le surprit d'une brûlure aussi soudaine que profonde, ne fit qu'ajouter à sa joie perverse.
Oui, Syan représentait à elle seule un défi de taille, une récompense inestimable pour lui qui semblait attendre depuis des siècles interminables, et s'en était d'autant plus excitant que le travail pour parvenir à  faire ployer l'échine à cette belle démone risquait d'être plus long et fastidieux que la conquête d'un nouveau royaume. Long car même entravée, blessée ou torturée, il était certain que la diablesse vêtue de soie garderait la tête haute, le menton fièrement levé alors que ses yeux impériaux, sans faillir, soutiendraient son regard, fastidieux car pour enfin, réussir à domestiquer et, plus que cela, fidéliser cette lionne impitoyable, il lui faudrait user de plus de méthodes, d'astuces et de perfidie que jamais il n'en eu la nécessité.
Et cela commençait à l'instant.

Le sourire de l'infernal se fit plus maigre, mielleux, presque naïf pour appuyer ses paroles exécrables. Si la tentation d'un plaisir certain ne calmait pas la rage de sa muse, alors il ferait en sorte que sa propre haine la fatigue et l'épuise.

- J'ai quoi en échange ?

Ainsi changea-t-il de rôle, endossant le masque innocent du gamin candide et tout sourire, si bien joué qu'on l'eu cru sincère. Dans d'autres situations, on aurait pu le penser entré dans un nouveau jeu, taquin et innocent. A l'instant, il ne dissimulait qu'un mépris certain pour le voeu de sa prisonnière, une inconsidération indubitable, dont le seul et unique but était de faire gonfler l'ire de sa femme, jusque la faire exploser.

Pouvait on encore parler de surprise lorsque le simple fait de s'y attendre était admis ?
Pas vraiment, d'aucuns diraient "certainement pas". Désormais, le résultat du moindre acte exécuté ou orchestré par son épouse ne relevait que de la satisfaction, ou de la déception, selon que ses choix portent ou non sur des initiatives tantôt sensées, tantôt divertissantes, mais prêt à tout venant d'elle, et au meilleur plus qu'au pire la concernant, Azael ne fut certainement pas surpris, et encore moins prit au dépourvu par sa répartie admirable.

Son sourire s'élargit brièvement, s'il avait été homme à se porter garant d'autrui, il aurait pu être fier de cet oiseau pris, pourtant bien à contre cœur, sous son immense aile influente, nourris, logé et pouponné sans qu'il ne s'en inquiéta jamais et qui, déjà si vite, répondait à tout ce qu'on attendait de lui. Mais le cadet de la fratrie ne l'était pas. Si l'on mettait de côté ses propres créations dont il s'attirait tout naturellement l’entièreté du mérite, l'érudit régent fuyait ce genre de situations où l'on pu, à posteriori, lui reprocher le moindre défaut injustifié ou dissimulé dont il n'eu lui même conscience, ou qui ai pu se développer une fois qu'il n'ai plus été le responsable de l'objet - la chose, le sujet, l'esclave, l'être si on allait jusqu'à lui offrir telle considération - accusé. Si la réputation du monarque frôlait la perfection, ce n'était pas pour lui même chercher à la souiller, il laissait telle responsabilité - stupidité - à ses deux frères irréfléchis. Lui gérait en aval, rien de plus. De ce fait, car ici on s'éloignait du sujet, l'esquisse qui étira les lippes du démon ne relevait d'aucune fierté mal placée, mais finalement de la satisfaction énumérée un peu plus haut. Il ne dura pas cependant, non pas que l'exprimer l'en déplaise, mais il se fallait réagir en meilleure mesure s'il ne souhaitait pas que sa belle, d'abord le pense incapable de répondre et ensuite, en vienne à se croire tout permis. Le but était justement de lui faire comprendre qu'en dépit de son statut de reine démoniaque, elle n'était rien.

Sans jamais lâcher son trop maigre poignet qu'il gardait encore fermement prisonnier de sa paume, Azael mena son autre main au visage encore parfait de l'enfant qui lui avait été donné d'épouser. Le dos de ses doigts frôla sa joue diaphane un bref instant, puis sa paume trouva tout naturellement place sur sa mâchoire, son pouce tout juste contre sa lèvre inférieure qu'il se permit de découvrir du bout du doigt.
Il se fit plus grave, départi d'une esquisse comme d'un rôle endossés à peine quelques secondes plus tôt au profit d'un air plus sombre, qui se voulait sérieux et conséquent, en somme, qui devait appuyer l'honnêteté de ses paroles.

- Un baiser sincère m'aurait suffit, je ne suis pas homme difficile à combler.

Constat véridique dans une certaine mesure, néanmoins, et parce qu'il doutait que sa muse ne concède en sa faveur après avoir exprimé pareille colère, il poursuivit. Ses paroles, d'abord d'une certaine solennité, se firent plus mielleuses, mais la douceur mignarde de ses mots tranchait avec la rudesse de sa poigne et l'aiguisé de son ongle qui, à son tour, marqua la chair fragile de sa belle, inscrivant, tout en parlant, sur sa lèvre qu'il caressait encore la même griffure qui venait de lui être administré.

- Mais puisque ceci je ne l'aurai pas, je me contenterai de prendre quelque chose à quoi tu tiens.

Azael dégagea sa main, celle là qui administrait tantôt caresses, tantôt sanctions, ainsi que la seconde qui la retenait captive et avant que sa femme ne puisse réagir, il vint saisir ses deux bras si fermement qu'il pu la soulever de terre.
Faisant fi de ses nouvelles tentatives pour lui échapper, et toujours si peu concerné par l'état de son pull, il l’amena une nouvelle fois au lit nuptial qui jusqu'alors, s'associait à davantage de peine que de plaisir et une seconde fois, il chercha à l'y immobiliser. Le résultat, bien plus concluant que plus tôt, fut obtenu d'une rapidité déconcertante, non sans heurt car il dû encaisser le choc puissant d'un talon droit dans ses côtes, mais d'une manière aussi efficace qu'elle ne devrait être durable.

Si à l'instant, Syan se tenait en place, ce n'était pas de son propre gré, mais parce qu'il avait cédé à la contrainte qu'offraient de solides liens qu'il fixa à chacun des barreaux ornant le pourtour de la couche royale. Allongée sur le dos, les deux poignets joints au dessus de sa tête - elle aurait été bien mieux avec les bras écartés mais face à telle ardeur pour lui échapper, Azael avait choisi la facilité de l'inconfort - et les deux jambes maintenues tendues de l'autre côté du matelas, la belle n'avait aucun mou pour bouger, détendre ses muscles, changer de position ou même saisir la chaîne pour mieux la tirer. Prisonnière enfin soumise, elle offrait, ici aussi, vision des plus charmantes, étendue et offerte, sa robe affriolante remontée sur ses cuisses ouvertes et le regard lourd de haine et de défi.
Encore à l'instant installé au dessus d'elle, Azael le lui laissa sous entendre pareil désir en s'abaissant pour baiser sa gorge, une main apposée sur ses côtes, une initiative prise uniquement pour, encore davantage, faire enfler son ire plus que pour profiter d'une faiblesse certaine. Il ne se redressa qu'une fois assuré qu'elle fut aveuglée par la haine, dépossédée non pas de sa pudeur, car ceci il le lui volerait plus tard, mais de sa liberté de mouvements, il eu l'audace de le lui faire, là aussi, un instant remarquer, taquin mais de ce fait, perfide et mauvais.

- Je te laisse te mettre à ton aise, et bon courage si tu veux attraper un coussin.

D'autant plus hypocrite, il vint embrasser son front puis se releva, décidé et cette fois-ci libre de partir sans ni être retenu, ni être rejoint, car d'ici là que la jeune femme parvienne à se libérer, que ce soit en cédant à une transformation ou non, il aurait pu profiter de la volière de tout son saoul.
Ce ne fut qu'une fois la porte ouverte qu'il songea à lui faire part d'un nouveau commentaire, soit rassurant, soit tout à fait inquiétant.

- Je te dirais bien de prier pour que quelqu'un vienne dans la chambre avant que je ne revienne te libérer mais ... Tu risquerais de le regretter.